Ouais, j'ai des fans! Je vous préviens, pour le début, ça risque de prendre un tit peu de temps parce que je peux pas trop aller sur l'ordi en ce moment...
Chapitre un: Des amis de nécessité
George Harrison était le meilleur ami de Kathleen Romualda Marchombre. Ils n'avaient pas beaucoup de points communs. Ils ne s'appréciaient pas des masses. Ils se disputaient souvent. Et se tenaient en piètre estime.
Mais l'inconvénient, était que George Harrison était la seule personne de l'âge de Kathleen n'appartenant pas au Siège Alchimique à vingt kilomètres à la ronde. La courbe de natalité du village de Coldwick était en chute libre: la jeunesse du village se résumait à George Harrison et deux jumeaux de cinq ans. Le bled qui pue du cul comme l'appelait le sergent Highlander (qui ne décolérait pas d'avoir été affecté ici, d'ailleurs) était l'endroit le plus paumé de la planète.
Le Siège Alchimique Gouvernemental ne servait pas à grand-chose, en plus. Dans cette partie reculée du monde, il n'y avait pas de criminels armés jusqu'aux dents à apréhender, pas d'attentats à la bombe, strictement RIEN. L'affaire la plus palpitante qu'il avait dû résoudre tenait en ces mots: une vieille dame avait été retrouvée morte dans le lit d'un ruisseau. Elle était myope. La feuille de chou locale "Le petit colporteur" avait fait de l'affaire son gros titre: "Une vieille dame tuée par sa mauvaise vue".
Elle était simplement tombée dans le ruisseau...
La deuxième affaire la plus intéressante avait été "L'origine des ossements dans le champs de blé du père Pissard".
Il s'agissait simplement des ossements de Moumouche, le chat de Madame Petit-pot-de-bois qui avait eu la mauvaise idée de dormir sous le tracteur du père Pissard. La bête était passée dans le broyeur.
Georges Harrison était le fils de Clodobert Harrison, qui était garagiste. C'était à lui que Kathleen devait un tour de vingts minutes dans un voiture volée. Et à lui aussi qu'elle devait une baffe monumentale de Felika Highlander qui l'avait arrêtée et qui avait ôté des points sur le permis de Georges avant même que celui-ci l'ai.
Et là, Kathleen poireautait devant l'Eglise St Anselme, depuis vingt minutes déjà. Elles avait besoin de discuter et, en désespoir de cause, avait appelé Georges au secours. Il est aussi utile de préciser que personne n'appelait Georges Harrison Georges, même pas ses propres parents. Ils avaient dû se rendre compte après coup qu'ils avaient attribué un nom atroce à leur fils.
Le "nouveau" nom de Georges était Charlie. Cela lui allait bien mieux, seul le sergent Highlander s'obstinait à l'appeler Georges.
Le souffle de Kathleen dessinait de fins chapelets de buée dans le brouillard matinal. La campagne qui entourait Coldwick était la campagne la plus morne du monde. Les buissons étaient pitoyables et des morceaux de sacs plastiques étaient suspendus à chacunes de leurs branches ou presque. La campagne la plus morne et la plus détestée.
Kathleen s'impatientait. Elle n'avait pas de manteau (les finances du Siège étaient au plus bas, on avait pas jugé de première nécessité d'acheter un manteau à la première Alchimiste femme de l'Histoire) et il faisait moins dix degrés. Elle avait juste enfilé un gros pull informe appartenant au sous-lieutenant Grant par dessus son débardeur mauve, comme ses lèvres. Son collier de molosse la démangeait, elle l'ôta et le fourra dans la poche de sa jupe en jean. Un bruit de Harley-Davidson au pot d'échappement bidouillé de manière anarchique déchira la calme quiétude campaganarde.
Kathleen se boucha le nez:
"Eêêrk! Elle pue ta moto! Qu'est-ce que tu lui a fait, à ce pauvre tas de ferraille?"
La fumée noirâtre se dissipa et laissa apparaître un rouquin dégingandé, les cheveux dressés au gel dans ce qui semblait être une imitation maladroite de la coiffure du "Ninja vengeur", le héros du manga du même nom. Il avait les mains dans les poches, un jean troué à chaque genoux et un sac à dos badigeonné de Blanco sur le dos, les bretelles réglées au maximum. Il se planta devant Kathleen avec un grand sourire.
"En fait, ce fabuleux système dont je suit l'inventeur permet de frimer encore plus.
-Et comment?
-T'as pas remarqué que le bruit était surpuissant, avec?"
Kathleen retira sa casquette qu'elle avait mise à l'envers, révélant des cheveux d'un violet éclatant et rigola:
"Tu es ridicule.
-Pas plus que tes cheveux et tes boucles d'oreilles par paquets de douze."
Tout en attachant sa moto à l'aide d'un morceau de chaîne et un cadenas à un réverbère, Charlie demanda:
"Bon, on arrête de se débiter des joyeusetés. Où on va? On reste glander sur le parvis de l'église où alors on va se promener ailleurs?
-Le centre commercial de Littletown sera très bien.
-Oh non alors! C'est à trente kilomètres! Si je me fait encore pincer par ton vieux, je n'aurais pas le droit de conduire avant même de passer mon permis! protesta Charlie.
-Felika Highlander n'est pas mon vieux! C'est mon tu-teur, tu sauras un jour rentrer cette information dans ton petit cerveau à la gueule de raisin sec?
-C'est bon, c'est bon, je t'emmène" lâcha Charlie, de mauvaise grâce.
Kathleen grimpa et se justifia, avec une certaine dose d'ironie:
"Aussi, c'est pas ma faute, tu es le seul moyen de locomotion dont je dispose. Au Siège Alchimique, ils s'affairent bien trop pour s'occuper de moi."
Charlie ne répondit pas et rajusta son écharpe.
"Tu boudes?" demanda Kathleen en lui cachant les yeux.
Charlie la chassa d'un revers de main.
"Arrête!"
Ils dépassèrent la dernière maison du village (qui en comptait vingt-neuf) et Charlie souffla de soulagement.
"Ouf, les Alchimistes se sont pas pointés.
-Je te rappelle que tu en as une avec toi se marra encore Kathleen.
-Oui, bon, ça va souffla Charlie, agacé. Tu me laisses conduire en paix, veux-tu? Si on se crashe, tu mourras aussi."
Kathleen avait quinze ans. Charlie dix-sept. Le rouquin avait été déscolarisé à l'âge de quatorze ans et passait à présent la majorité de son temps allongé sous une voiture, une radio vomissant une déchirante ballade de blues comme
"Woke up the morning a towel around my head" de celles qui traitent de types qui se réveillent dans leurs lit, après leur suicide raté. Dans le cas de
"Woke up the morning a towel around my head", le type en question avait une serviette ensanglantée autour de la tête et gémissait durant toute la chanson qu'il voulait mourir et qu'il n'avait rien à faire sur Terre. C'était là le genre de truc qui émeuvait considérablement Charlie Harrison et que Kathleen trouvait franchement pitoyable.
Le vent fouettait les cheveux courts de Kathleen. Si Felika avait su ce qu'elle était en train de faire à l'instant même...Elle se serait pris une gifle qui aurait laissé une marque sur sa joue. Le lieutenant Highlander était son sauveur, en quelque sorte. Lors d'une crise qu'il avait piquée, alors qu'il avait treize ans et qu'il s'était enfuit du Siège Alchimique, il l'avait trouvée dans un carton. Le nom de Kathleen Romualda Marchombre venait d'abord du fait que son carton était un carton de galettes salées de Romualda Marchombre, une gentille grand-mère qui apparaissait sur tous les paquets, dans un cadre en médaillon doré.
Quand à son prénom, c'était Felika qui l'avait choisi, c'était le prénom de sa copine de l'époque, qu'il avait totalement oubliée depuis.
Bon, je vais essayer de poster la suite le plus vite possible.